dimanche 29 septembre 2013

Les émotions formidables



Il y a Stromae, un véritable talent. Ensuite une chanson, Formidable, parue en juin dernier par le biais d'un clip viral (plus de 29 millions de visionnements à ce jour) où le chanteur simulait un état d'ébriété dans les rue de Bruxelles. Une approche brillante, filmée en mode guérilla et qui élevait Paul Van Haver (de son vrai nom) à un autre rang, à des milles du générateur de tubes comme Alors on danse.

Et là, quatre mois plus tard, après la sortie de son nouvel album, Stromae nous refait le truc pour la centième fois fois sur un plateau de télé, cette fois-ci en présence de Dany Boon lors de l'émission Vivement Dimanche, animée par Michel Drucker. Toujours la même simulation d'état d'ébriété et de spleen. En principe, nous ne devrions pas être émus en regardant la séquence. C'est théoriquement du déjà-vu. Mais non, au contraire, et c'est surprenant, ça nous prend au coeur, pour ma part encore plus que la première fois. Pourquoi? Une raison: l'intensité.

L'intensité permet de complètement «distortionner» la réalité et de s'approprier l'instant présent. Là où l'humour provoque un effet instantané qui s'estompe généralement aussi rapidement, l'intensité de l'émotion dramatique transperce souvent nos coquilles et s'immisce en nous pour une période dont la traîne sera beaucoup plus longue. Une émotion qui perdure car elle pointe sur des expériences personnelles marquantes, un peu à la manière des petites madeleines de Proust.

C'est un peu étonnant que les créatifs persistent à miser sur l'humour dans des proportions aussi stratosphériques, quand d'autres stratégies de création permettent de marquer la «cible» de manière beaucoup plus durable. Le consommateur ne mérite-t-il pas, tant qu'à subir plus de 5000 stimulus publicitaires dans une journée, de ressentir, ne serait-ce qu'à l'occasion, des émotions formidables?

Un gros merci à Claudine Dubé pour le tuyau de la performance montrée en intro.

lundi 23 septembre 2013

Toute la beauté du monde




« Les gens stupides ne voient la beauté que dans les belles choses. »

La beauté dans la survivance. Dans cette volonté d'amour inconditionnel. Dans la pureté du sentiment. La beauté dans la souffrance, dans la révélation de la violence et de la haine. La beauté du symbole qui transcende les cultures et les frontières. Toute la beauté du monde ailleurs que dans l'image que nous nous faisons de la perfection. La beauté, toute la beauté du monde, dans la misère du monde. La misère qui devient signifiante, à des années lumière de l'illusion provoquée par le désir adolescent de devenir un clone de couverture de magazine. La beauté, toute la beauté du monde, dans l'unicité, dans les anomalies, dans ce qui nous impose le mépris de notre propre vanité. 

La publicité expose généralement toute la laideur du monde, à grandes doses d'implants, de dents trop blanchies et de proportions irréelles des corps. Toute la laideur du monde à vouloir vendre aux masses une conception irrationnelle de l'humain. Une laideur qui supprime les cernes, les rides, les bourrelets et alimente l'anxiété du rejet. Mais elle n'a pas à demeurer ainsi, à l'encontre de la vie.

À la suite de ma visite de l'exposition World Press Photo avec mon équipe vendredi dernier, une expérience qui nous démontre justement, entre autres choses, toute cette beauté dans la souffrance, il est impossible de demeurer insensible à des réalités bien tangibles qui se déroulent à moins de douze heures d'avion de Montréal. Impossible de ne pas réaliser l'insignifiance de nos problèmes et de nos angoisses, mais surtout, impossible de ne pas réprouver cette pulsion de célébrer la vie en la vivant pleinement, sans concession, une seconde à la fois. 

Crédit et description de la photo
Par Ebrahim Noroozi. Une femme et sa fille à Bam en Iran, dont les visages ont été aspergés à l'acide par le mari (et père) lors d'une nuit, à la suite des demandes de séparation formulées par la femme. Sa fille et elle s'embrassent car elles sont seules au monde à pouvoir et à vouloir le faire. Photo gagnante du premier prix dans la catégorie «Portraits» du World Press Photo 2013.

mercredi 18 septembre 2013

Les abuseurs d'enfants

Il est 7h20. Je complète mon entraînement sur mon tapis à la maison. Fiston, 6 ans, termine son déjeuner et s'habille comme un grand en écoutant sa chaîne de télé favorite: TÉLÉTOON. Étant donné que c'est son anniversaire bientôt, il s'amuse à écrire (il débute dans le domaine) sur un grand carton ce qu'il aimerait recevoir en cadeau pour l'occasion. 

Comme vous le savez, au Québec, la Loi sur la protection du consommateur interdit toute publicité destinée aux enfants de moins de 13 ans, à quelques exceptions rarissimes près. Ceux qui violent cette loi sont exposés à des poursuites pénales importantes.

Revenons donc à mon fiston, qui a maintenant terminé de s'habiller et dont l'attention sera fixée à l'écran pour une quinzaine de minutes (je ne lui en permets pas vraiment plus). Il écoute un épisode de Scooby-Doo, qui doit bien dater des années 70. Quelques minutes plus tard, on en vient à une pause publicitaire. Quelques messages qui s'adressent aux adultes, défilent, rien à signaler de particulier, quand soudainement on passe un aperçu de l'émission Chima. Chima, c'est une invention du géant Lego, qui vise à remplacer sa plateforme Ninjago. C'est que ce géant, dans sa stratégie commerciale, a décidé de produire du contenu pour alimenter ses ventes. On parle ici d'animer les produits disponibles en magasins, de bien les nommer, le tout à travers une trame narrative primaire qui permet aux enfants de bien les mémoriser et de ressentir un désir de possession bien palpable. Donc, dans cet aperçu du prochain épisode, ce que l'on voyait avait tout à fait l'air d'une publicité de jouet destinée aux enfants et les figurines bougeaient lentement pour qu'on puisse bien discerner leurs détails. Ne manquait que la mention classique de la marque et des magasins où les produits sont distribués à la fin. Dans la microseconde qui suivit, fiston me demanda illico de l'aider à noter les noms des personnages qu'il venait de voir à l'écran, car il espérait vraiment les recevoir en cadeau. L'arnaque de Lego, endossée par TÉLÉTOON, avait visiblement bien fonctionné.

Je dois une partie du développement de ma créativité à mon utilisation des blocs Lego. À l'époque, l'idée était d'utiliser les blocs pour construire, pour inventer. Il n'en n'est rien aujourd'hui. On propose des constructions déjà balisées qui mettent en vedette des personnages et des univers conçus pour alimenter la fréquence d'achat, sans compter la dimension guerrière sous-jacente à l'opération. Et pour contourner les lois, on crée des émissions qui servent de vecteurs commerciaux. Un film sera même lancé au début 2014... 

Les enfants sont donc exploités comme jamais en toute impunité. L'esprit de la loi est bafouée. Et nous, les parents, n'avons pas d'autre choix que d'interdire ces contenus à nos enfants si nous voulons limiter leur exposition à de la publicité camouflée. Ce «racket» est indécent. TÉLÉTOON (une propriété Astral, donc Bell) me dégoûte. Nos enfants méritent mieux. Vivement qu'ils retournent jouer dehors plus activement, à l'abri des ces abuseurs de confiance.



mardi 17 septembre 2013

La publicité se meurt


Les gens ne veulent plus regarder de la pub. J'irais même plus loin: ce qui est considéré comme de la bonne publicité n'attire que très difficilement l'attention du consommateur. On voit sur nos écrans des tonnes de concepts assez créatifs, qui mettent de l'avant une petite attitude décalée au goût du jour et je ne crois pas que ces messages fonctionnent. Ils sentent trop le créatif en quête d'un trophée. L'intention suinte. Et ça, ça répulse le consommateur. 

L'authenticité et la transparence deviennent un must, c'est clair, mais quand on prétend être honnête trop haut, trop fort, on se plante. Les publicitaires ne doivent plus faire de publicité. Enfin plus celle qui ressemble à de la publicité. Plus celle dont la structure est instinctivement détectée par le détecteur de «boulechite» de l'individu normal. Enfin, surtout plus celle qui prône les sempiternelles tactiques promotionnelles des années 80, des porte-paroles bidons ou des séquences de communication qui méprisent l'intelligence de la moyenne des ours. La publicité comme on la connait se meurt. Et c'est pas plus grave. Réinventons-là. À grands coups de vérité, d'humilité, de candeur divertissante, de surprises et de poils dressés sur les bras! Le consommateur fera le reste. Faisons-lui confiance.

dimanche 15 septembre 2013

Les lâches


Aujourd'hui, rien sur la pub, mais plutôt une petite réflexion personnelle en cette période de tension sociale. C'est une petite liberté que je m'accorde à l'occasion... Alors vous êtes tous avertis.

Nous connaissons tous un lâche. Ils sont assez faciles à identifier. Les lâches imposent leurs vues, car ils ne savent pas mériter le respect avec leurs idées. Les lâches s'assemblent, car en meute c'est plus facile de masquer sa vulnérabilité. Les lâches crient et lancent des injures, car intimider et attaquer est plus simple que de tenter de se mettre dans la peau de l'autre. Les lâches sont convaincus d'avoir raison, car avoir tort, pour eux, signifie mourir. Les lâches simplifient, car la complexité requiert de l'effort et du discernement. Les lâches, sur les réseaux sociaux, masquent souvent leur apparence, pour ne pas avoir à assumer la responsabilité du fiel qu'ils déversent. Les lâches ont peur mais se délectent de la souffrance des autres, ne se sentant ainsi plus seuls à souffrir. Les lâches sont mesquins, racistes et xénophobes, mais se drapent de toutes les vertus pour justifier leur position. Et ils s'endorment le soir bourrés de colère, mais surtout avec cette fausse assurance que procure l'ignorance, dans l'absence totale de doute. Leur univers est froid.

Les lâches sont faibles et ne représentent qu'une infime minorité, mais ils sont juste assez nombreux pour engluer la cohésion sociale, faire honte à tout un peuple et miner des débats sains entre différentes visions qui ne sont souvent pas aussi éloignées qu'elles en ont l'air. Je croise trop de lâches ces jours-ci. Ils attirent mon attention malgré moi.

Alors que faire? Au fond, les lâches ont seulement besoin d'amour et de réconfort. Ce sont des petites bêtes blessées par la vie. Alimenter leur bulle de rancoeur n'aidera personne au fond. Alors allons-y un lâche à la fois. Convertissons chacun un lâche à l'empathie et à la réflexion. Et restons calmes. Ensuite on pourra passer aux choses sérieuses, comme notre évolution et notre épanouissement collectif.

Crédit photo: LaPresse.ca

jeudi 12 septembre 2013

Une différence


J'aime mon métier. Mais ce que je préfère, c'est d'avoir l'occasion de contribuer à sensibiliser la population sur certains enjeux. Mais surtout, j'adore voir la structure d'agence que nous avons développé chez Défi, celle d'une agence boutique entièrement intégrée, être mis à profit à plein sur un même mandat, comme une ruche: développement Web et film publicitaire, médias, réseaux sociaux, relations publiques, etc. 

Nous avons donc lancé ce matin la campagne Mission Générations pour notre client l'APCHQ. Cette campagne vise à mobiliser la population pour que les décideurs politiques, par définition inertes sur des enjeux qui ne sont pas «urgents» sur leur échiquier, puissent ajuster leurs flûtes en vue d'une politique nationale d'habitation, qui favorisera l'accès à la propriété des générations futures. Car danger dans la demeure il y a. Vraiment.

Bravo à toute notre gang chez DÉFI marketing, merci à un client ouvert d'esprit, mais surtout, merci d'avance à vous tous d'appuyer cette cause. Comment? Simplement par quelques secondes de votre temps en signant le registre d'appui sur le site de la campagne. Car oui, la publicité peut parfois tenter de faire une différence, car nous le pouvons tous.

mardi 10 septembre 2013

Transformation absolut.

Quatre artistes: Woodkid, Aaron Koblin, Rafael Grampá et Yiqing Yin. Quatre disciplines. Quatre énergies modulées différemment. Une chanson: Ghost Lights par Woodkid. Un thème. Une ambiance. Mais surtout : une grande métamorphose de la marque Absolut à l'échelle mondiale par notre Sid Lee montréalaise. Et une réincarnation bien harmonisée avec l'essence de la marque, qui a décliné ses premières publicités artistiques à partir d'oeuvres de Warhol à l'époque. Enfin, une transposition en mode contemporain qui provoque chez moi une réelle admiration. 

De la publicité qui insuffle une bonne dose de motivation artistique à tout créateur. Bien au-delà du produit. Mais terriblement ancrée dans une époque. Le type de message qui en dira plus sur nous dans 20 ans qu'il n'en dit présentement. Un révélateur progressif. Une mine esthétique. En 84 plans.

mercredi 4 septembre 2013

La publicité volage



Nous vivons dans une société de droit. Les règles sont écrites. Mais les règles ne régissent pas tout et il est entièrement légal de ne pas être une «bonne personne» si on respecte les lois. Qui peut vraiment juger notre morale? Ne sommes-nous pas libres de vivre comme nous l'entendons? Certes, il y a un prix à payer à ne pas se conformer aux codes moraux de la majorité, mais se pourrait-il qu'il y ait aussi un prix à payer quand on s'y conforme sans réfléchir? Je le crois. Et ce prix, c'est la liberté. Nos choix sont personnels.

Les marques doivent-elles respecter la morale ambiante? Instinctivement, nous avons tendance à répondre oui. Mais si le défi principal d'une marque est sa différenciation et que sa cible principale revendique le bonheur, même au prix de la trahison du code, alors pourquoi marcher droit? Il est question ici de réfléchir à la balance qui résultera d'un choix: celui de véhiculer la tricherie à des fins de bonheur et de liberté. L'effet collatéral que subira une marque comme Vidéotron dans cette publicité sera-t-il plus grand que l'engagement et le rendement qu'elle engendrera auprès de sa cible principale? Est-ce que les valeurs véhiculées sont compatibles avec l'ADN de la marque? On parle ici de stratégie et de cohérence. Mais surtout d'une réflexion juste d'une certaine réalité trop souvent occultée. 

Je ne suis pas outré par cette publicité qui est pourtant décriée. Au contraire. J'y vois une fille qui s'assume et qui semble résolue à atteindre son idéal de bonheur. Oui, elle le fait au détriment de son conjoint, mais en aucun temps elle ne le dénigre directement. Combien de fois avons-nous vu en publicité des hommes d'affaires possiblement engagés, entourés de femmes fatales, sans ne jamais s'énerver le poil sur les bras pour autant? Dans la publicité montrée en introduction, on suggère des choses, mais là n'est pas un des rôles de la création publicitaire, soit de suggérer certaines choses pour que le consommateur puisse en bout de ligne se faire sa propre histoire? 

Certains diront que les enfants ou les mineurs ne devraient pas être exposés à ces valeurs. Que la malhonnêteté ne peut profiter à une marque commerciale. Que l'authenticité passe par la transparence. Peut-être. Mais comment pouvons-nous reprocher à la publicité d'être le «Polaroid» de notre société? La réalité vécue par les enfants, entre eux, n'est-elle pas cent fois plus cruelle que ce message décalé? N'est-ce pas respecter l'intelligence du consommateur que de lui montrer une situation où l'on ne se met pas la tête dans le sable?

À tout ceux qui demandent son retrait: de grâce, cessez ce prêchi-prêcha et regardez-vous dans le miroir. Si une simple publicité en vient à vous faire perdre votre sang froid, c'est probablement qu'elle déclenche chez vous un rejet qui, en bout de ligne, en dit plus sur ce que vous vous reprochez que sur ce qu'elle accomplit sur le plan communicationnel. La publicité est volage, comme nous le sommes collectivement. Et c'est tout à fait acceptable qu'il en soit ainsi.

mardi 3 septembre 2013

La pub, c'est facile


Pourquoi se casser le bol à trouver un concept? Parfois en pub, on veut juste trop, quand dans les faits, c'est tout simple: t'engages Romain Gavras comme réalisateur, tu te paies les droits d'une toune de Led Zep et tu fais parader des stars comme le vampirique Robert Pattinson ou la sémillante modèle Camille Rowe en leur demandant de jouer aux amoureux. Tu demandes alors à ton pote Romain de tourner plusieurs scènes sexy mais pas trop explicites. Puis tu promets au client une apparition «ontologique» du produit à la fin. Le tout en noir et blanc, avec une insertion couleur subtile en guise de conclusion pour établir le lien avec la marque. Et hop, si t'as une piscine, un bord de mer et une BMW vintage blanche (et quelques amis pour valoriser les éclats des rayons du soleil), et bien l'affaire est ketchup. Je le redis, la pub, c'est facile. 

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