mercredi 4 septembre 2013

La publicité volage



Nous vivons dans une société de droit. Les règles sont écrites. Mais les règles ne régissent pas tout et il est entièrement légal de ne pas être une «bonne personne» si on respecte les lois. Qui peut vraiment juger notre morale? Ne sommes-nous pas libres de vivre comme nous l'entendons? Certes, il y a un prix à payer à ne pas se conformer aux codes moraux de la majorité, mais se pourrait-il qu'il y ait aussi un prix à payer quand on s'y conforme sans réfléchir? Je le crois. Et ce prix, c'est la liberté. Nos choix sont personnels.

Les marques doivent-elles respecter la morale ambiante? Instinctivement, nous avons tendance à répondre oui. Mais si le défi principal d'une marque est sa différenciation et que sa cible principale revendique le bonheur, même au prix de la trahison du code, alors pourquoi marcher droit? Il est question ici de réfléchir à la balance qui résultera d'un choix: celui de véhiculer la tricherie à des fins de bonheur et de liberté. L'effet collatéral que subira une marque comme Vidéotron dans cette publicité sera-t-il plus grand que l'engagement et le rendement qu'elle engendrera auprès de sa cible principale? Est-ce que les valeurs véhiculées sont compatibles avec l'ADN de la marque? On parle ici de stratégie et de cohérence. Mais surtout d'une réflexion juste d'une certaine réalité trop souvent occultée. 

Je ne suis pas outré par cette publicité qui est pourtant décriée. Au contraire. J'y vois une fille qui s'assume et qui semble résolue à atteindre son idéal de bonheur. Oui, elle le fait au détriment de son conjoint, mais en aucun temps elle ne le dénigre directement. Combien de fois avons-nous vu en publicité des hommes d'affaires possiblement engagés, entourés de femmes fatales, sans ne jamais s'énerver le poil sur les bras pour autant? Dans la publicité montrée en introduction, on suggère des choses, mais là n'est pas un des rôles de la création publicitaire, soit de suggérer certaines choses pour que le consommateur puisse en bout de ligne se faire sa propre histoire? 

Certains diront que les enfants ou les mineurs ne devraient pas être exposés à ces valeurs. Que la malhonnêteté ne peut profiter à une marque commerciale. Que l'authenticité passe par la transparence. Peut-être. Mais comment pouvons-nous reprocher à la publicité d'être le «Polaroid» de notre société? La réalité vécue par les enfants, entre eux, n'est-elle pas cent fois plus cruelle que ce message décalé? N'est-ce pas respecter l'intelligence du consommateur que de lui montrer une situation où l'on ne se met pas la tête dans le sable?

À tout ceux qui demandent son retrait: de grâce, cessez ce prêchi-prêcha et regardez-vous dans le miroir. Si une simple publicité en vient à vous faire perdre votre sang froid, c'est probablement qu'elle déclenche chez vous un rejet qui, en bout de ligne, en dit plus sur ce que vous vous reprochez que sur ce qu'elle accomplit sur le plan communicationnel. La publicité est volage, comme nous le sommes collectivement. Et c'est tout à fait acceptable qu'il en soit ainsi.

LinkWithin

Related Posts with Thumbnails