mercredi 22 février 2012

La stratégie de l'idiot


Quand les budgets sont restreints et que les objectifs restent ambitieux, la seule issue est la créativité, à défaut de quoi on se fond dans la masse en annonceur de second ordre. Plusieurs marques empruntent alors la voie de la controverse ou de la stupidité pour attirer sur elles les projecteurs et espérer augmenter leurs ventes. Peu réussissent à flirter habilement avec la fine ligne qui sépare le bon goût et le respect de la démagogie et du préjudice. La marque de vodka Wodka, particulièrement présente dans la région de New York, n'y va pas de main morte. Concept stupide infiniment déclinable pour un maximum d'exposition médiatique négative. De la publicité de lobotomisés qui vise les amateurs de vodka qui «goutte bon dans la bouche», mais pas cher pas cher.

La stratégie de création est assez simple: opposer la qualité du produit à son bas prix. On a ainsi comparé cette vodka à un homard et son prix à une bisque, idée facile. Ensuite, on est passé en deuxième vitesse en comparant sa qualité à celle de Noël, puis son prix à la fête juive Hanoucca, provocant à New York un tollé de protestations, notamment de la communauté juive, qui a mené au retrait des panneaux d'affichage extérieur. Mais ce n'était qu'un début. Wodka vient tout juste de récidiver avec une déclinaison misogyne et totalement vulgaire de son concept, comparant la qualité du produit à une escorte de luxe et son prix à une prostituée de rue. La preuve qu'un annonceur qui le veut vraiment peut toujours se dépasser…

Ici au Québec, la stratégie de l'idiotie est souvent empruntée par des marques relativement présentes dans les médias. Le hic, c'est qu'elles n'arrivent même pas à choquer et demeurent simplement nulles. Des exemples? Qualinet, Léon et Brault et Martineau, pour ne nommer que celles-ci. Est-ce payant de véhiculer une personnalité de la marque qui s'apparente à une maladie mentale? Peut-être si on vise une relation dans laquelle le client viendra acheter parce qu'il aura l'impression de berner une entreprise pas très dotée côté ciboulot, mais honnêtement, cette hypothèse reste étrange. Je persiste et je signe: de faire parler en mal de sa marque en se disant que ce sera suffisant ne tient plus la route. La réussite ne se résume plus à la position en tête de liste dans la tête d'un prospect. On vise ici une appréciation qualitative qu'aucune fréquence média ne pourra engranger, pas plus qu'une approche créative digne du paléolithique. En fait, la question est simple: aimeriez-vous projeter votre identité intime dans une marque qui vous renverrait l'image d'un ivrogne sans classe? La stratégie de l'idiot, globalement et à long terme, ne paie pas. C'est un mythe. Merci à mon vieux chum Jief pour le tuyau.


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