mardi 18 octobre 2011

Technopoésie




La poésie récitée n'a jamais eu la cote auprès du grand public québécois. Pas assez viril. Trop de dentelle. Trop artistique. Incompréhensible. Cette allergie collective à la poésie illustre bien ce réflexe généralisé dans certains milieux, qui relève à la fois d'une méconnaissance crasse de la culture, de son association puérile à l'homosexualité, le tout mêlé à de l'anti-intellectualisme primaire. N'empêche, certaines nations plus évoluées apprécient la poésie, allant même jusqu'à élever certains de nos poètes au rang de héros national, comme ce fut le cas de Leonard Cohen en Scandinavie, une région où il vendait à une certaine époque plus d'albums que Michael Jackson. La poésie représente une opportunité totalement unique de livrer des émotions, parfois à fleur de peau. C'est une avenue à explorer en création publicitaire.

Le film publicitaire de Sony présenté en introduction m'a réellement touché. Ce film, du réalisateur Arev Manoukian, est tout simplement une refonte plus concise, à la demande de Sony, de son court-métrage primé intitulé Nuit Blanche. Mais cette fois-ci, son concept «d'hyper-réalité» du moment amoureux, aussi absolu que spontané, est transcendé par l'interprétation de A Thousand Kisses Deep par notre célèbre poète de la rue Saint-Laurent. Ici, la technologie fait autant corps avec la poésie qu'avec le registre unique de la voix de Cohen, ce qui a pour effet d'amplifier l'émotion à un niveau impressionnant. Évidemment, on transpose avec élégance le potentiel de la télé 3D, mais le message commercial demeure au service de l'art, ce qui est rare. Très rare.

La technologie ne gagne jamais à prendre toute la place. Seule, elle demeure froide, stérile, dénuée de sens. Il faut sortir de notre état de fascination technique et réussir à mater la bête. C'est ce qui a été fait pour Sony ici et c'est une piste de création qui devrait être exploitée de manière plus fréquente à l'avenir. Et qui sait, peut-être pourrons-nous un jour sortir collectivement de notre torpeur en ce qui a trait à la poésie, peut-être parce qu'elle nous sera désormais livrée par la technologie.

Plus bas, le film original Nuit Blanche, de même que le poème original de Leonard Cohen. Tout ça est très très beau…



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