jeudi 23 juin 2011

Le dogme du mesurable

En marketing, en publicité, mesurer le rendement des tactiques mises de l'avant est essentiel. C'est une évidence. Personne ne serait assez téméraire pour risquer d'investir des millions de dollars dans une campagne basée sur le seul pif d'un stratège ou d'un créatif. De plus, avec l'émergence du Web dans le mix communicationnel, les tests, les projections de retour sur investissement et la mesure en temps réel sont monnaie courante. Je n'ai rien contre la mesure, au contraire, car elle permet d'améliorer et de peaufiner nos techniques tout en solidifiant la relation avec le client. Ça permet aussi de bien nous garder les pieds sur le plancher des vaches. Ce sur quoi je tique, c'est le dogme du mesurable, soit d'ériger la mesure en système AVANT de bien positionner la marque dans l'esprit du consommateur, comme une religion du gestionnaire avisé. En clair, je déteste qu'on mette la charrue avant les boeufs.

Combien de PME peuvent se vanter d'avoir «positionné» de manière intelligente leur marque avant de se lancer dans différentes tactiques publicitaires comme d'annoncer dans les Pages jaunes ou encore sur le Web? Peu. Trop peu. On évacue souvent une notion élémentaire: avant de parler ou de converser avec le consommateur, il faut que la marque EXISTE. Qu'elle ait une image et des valeurs propres, une personnalité attrayante, qu'elle soit clairement différenciée de la concurrence, bref, qu'elle se donne une chance de résonner dans l'esprit de la clientèle ciblée. Ce travail de «branding» est de nature relativement qualitative, même si nous nous basons généralement sur des analyses tangibles de la concurrence tout comme sur des sondages ou de la recherche relative au champ d'activité de l'entreprise. Cette gestation de la marque, en amont de la planification marketing, pourra aussi faire l'objet de tests en groupes de discussions. Mais il n'en demeure pas moins que les résultats reliés à ces investissements ne seront que très difficilement quantifiables à court terme. Ce travail demeurera néanmoins, selon moi, l'un des aspects les plus névralgiques relié au lancement ou à la refonte d'une marque. On parle ici de développer un actif qui sera au centre de la valeur de l'entreprise dans quelques années, ce qu'on nomme «l'équité de marque». Malheureusement, cet actif est à peu près impossible à mesurer au préalable.

La morale de cette histoire? Si vous exploitez une PME et que vos publicités, votre site Internet et votre papeterie donnent l'impression de provenir de différentes planètes, peut-être à l'exception du logo développé par votre beau-frère graphiste dans son garage, c'est que votre marque n'existe probablement pas. Que votre entreprise, malgré les ventes qu'elle génère, ne fait que répondre à une demande basique fondée par l'intérêt commercial brut. Ça signifie que vous n'exploitez qu'une parcelle du potentiel réel de votre entreprise et que vous laissez à vos concurrents toute la place. Vous pourrez mesurer la rentabilité des vos actions marketing ad vitam aeternam, la prémisse de votre calcul est fausse. Désolé. Combien de dollars perdez-vous au change? Plus que vous ne le croyez, mais ça encore, je ne pourrais vous le dire exactement, car ça relève du gros bon sens, qui lui, ne se mesure pas.

LinkWithin

Related Posts with Thumbnails