mercredi 9 juin 2010

Vendre sa salade


En publicité, parfois, nous nous buttons à des produits ou services peu attrayants pour le consommateur. Des trucs non-différenciés qui laissent les gens de glace. Ce sont, par contre, des défis de tous les instants pour les créatifs qui doivent alors trouver le bon angle, extraire un bénéfice sans endormir l’auditoire, bref, faire le fameux saut créatif. Ces comptes sont souvent une opportunité d’aller ailleurs, de réellement sortir des sentiers battus.

Mon ami français, Sébastien Lafaye, qui sera bientôt parmi nous à Montréal, m’a envoyé hier une série de trois petits films publicitaires de son cru développés pour Bonduelle, un client de l’agence Australie avec qui il collabore à Paris. Ces publicités présentent différentes variétés de verdures en sachet, dont ma préférée portant sur la roquette ici en intro, et me fournissent aussi un bon prétexte pour partager avec vous un autre aspect de ma vision de la publicité.

Y-a-t-il sujet plus banal et moins différencié que de la salade? Non, à part peut-être Hydro-Solution et ses chauffe-eau cylindriques, parodiée par Marc Labrèche lors de sa dernière campagne l’an dernier. Et bien, peu importe la nature «plate» de la salade, on a tout de même réussi en 50 secondes à nous embarquer dans un univers animé original, en utilisant une tonalité franchement décalée, tout en présentant efficacement le produit et son attribut principal, dans ce cas-ci, l’effet de contraste qu’apporte la roquette en salade, tant sur le plan visuel que par son goût plus relevé.

Tout ça pour vous dire l’évidence: la publicité sans produit n’existe pas. Sans bénéfice direct ou indirect (ou même inconscient) du produit, elle est inutile. Certains ont beau se draper dans les sacro-saintes vertus de la créativité artistique, n’en restera pas moins que nous, les publicitaires, devons vendre une salade, peu importe les détours que nous empruntons. Trahir le consommateur n’est tout simplement plus rentable, c’est pourquoi nous devons, par intérêt, respecter son intelligence, demeurer honnêtes, transparents, ne pas induire de fausses perceptions, ne pas le tromper ni, pire encore, se servir de causes sociales pour le manipuler. Je le répète, par intérêt, celui à long terme de la marque qui ne saurait croître sainement dans un univers de perceptions négatives. Mais nous devons quand même vendre. Assumer cet aspect est fondamental. C’est ce qui nous permettra d’évoluer en toute lucidité dans l’univers de la création publicitaire. Car la créativité est un moyen, possiblement le seul qu’il nous reste, pour arriver rejoindre notre ultime objectif, pas très sexy, celui qui est difficile à avouer pour plusieurs: vendre plus.

3 commentaires:

  1. Commentaire que j'aurais écris il y a quelques temps :
    Il y a des créatifs qui pensent qui font quoi alors? Nous tous des vendeurs exaltés. La séduction doit avoir un but de faire acheter. Genre.

    Commentaire d'aujourd'hui :
    Non. Les créatifs n'ont pas à vendre mais à rapprocher les parties. Ils doivent mériter l'attention et le respect du monde et des compagnies. Le saut (du) créatif, la grande idée, unique, c'est dépassé. Un millions d'idées géniales qui poussent de partout. Un grand créatif aujourd'hui est un grand jardinier, ce n'est plus un tireur d'élite.

    Enfin, j'pense...

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  2. @Martin
    D'accord avec toi, il faut parfois faire son deuil de la grande idée. Mais on ne peut se limiter à bâtir un capital de sympathie, il faut communiquer un bénéfice, le fameux «what's in it for me?». La créativité viendra tout autant du média, du mix, de la stratégie. Mais on ne peut pas séduire et rapprocher les gens d'un produit ou d'un service en niant le caractère commercial. Ton image du jardinier est très juste et très belle. Merci!

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  3. Tout à fais d'accord avec toi. La pub s'est faire aimer un produit (son image) et ce, assez pour l'acheter même si on en a pas besoin !

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